LUCA DE MEO OU LE PARI DE LA « RENAULUTION »

lun, 06/02/2023 – 04:32 – AFP

Luca de Meo, pro du marketing, a accéléré l’électrification de Renault et sa montée en gamme pour tenter de sortir le constructeur de l’ornière.

Cet Italien francophone a pris le volant de Renault en 2020: excellent communicant, expert en marketing, le nouveau directeur général est arrivé dans une entreprise traumatisée par plus d’un an de crise dans le sillage de l’affaire Ghosn, entre ventes en chute et cadres dépités qui claquaient la porte.

Le rééquilibrage de la relation entre Renault et Nissan était une des épines dans son ambitieuse stratégie de relance.

– Virage électrique –

M. De Meo, 55 ans, a démarré sa carrière chez Renault. Ce quinquagénaire souriant, vêtu de costumes élégants, à la chevelure grisonnante bien rangée, a « un sens inné du marketing », affirme un ancien cadre du groupe qui l’a côtoyé dans les années 1990.

Il est ensuite passé à la direction de Fiat, où il a relancé avec succès la petite 500, avant de redynamiser Seat pour le groupe Volkswagen.

Chez Renault, il espère rééditer l’exploit à partir de 2024 avec les Renault 4 et 5 en version électrique. Ces deux modèles doivent porter la « Renaulution », le plan de M. De Meo pour relancer Renault.

« Il n’a rien d’un dictateur. Il a énormément d’éducation, c’est un manager qui ne hurle pas », disait de lui un ancien collaborateur de Seat, à sa nomination en 2020. « Il a un côté charmeur mais en même temps il sait garder ses distances ».

Il a « un côté artiste » tout en travaillant ses sujets de façon « quasi-scientifique », ajoutait ce cadre, sous couvert d’anonymat.

La période est complexe pour le marché automobile, paralysé depuis 2020 par les pénuries de puces électroniques, puis par la guerre en Ukraine. Renault a dû se séparer de sa filiale russe Lada, et ses chiffres de ventes ont plongé, malgré les excellents résultats de sa marque à bas coût Dacia.

Mais le groupe a réussi à améliorer ses marges en vendant ses voitures plus cher.

Pour donner un nouveau coup de collier, M. De Meo a décidé de multiplier les partenariats. Il compte notamment faire appel aux investisseurs en lançant son entité électrique en Bourse, Ampère, à partir de fin 2023.

Le Losange « jouera le jeu » de la révolution électrique « en investissant le moins possible », expliquait M. de Meo aux investisseurs fin 2022.

Renault va aussi se relancer dans les voitures de luxe en donnant de l’ampleur à sa marque Alpine, désormais connue mondialement via son écurie de Formule 1.

En parallèle, le groupe va limiter les investissements dans les motorisations thermiques et hybrides: leurs pièces seront désormais produites par une filiale à 50/50 avec le géant chinois Geely.

Renault devra ainsi « exceller au pentathlon » et réussir dans chacun de ces domaines, plutôt que « seulement jouer au foot », soit fabriquer des voitures à essence, avait poursuivi le dirigeant, adepte des expressions imagées.

Les investisseurs ont salué cette stratégie: l’action Renault à la Bourse de Paris a commencé à se relever de sa descente aux enfers entamée en 2018.

– « Mission impossible » –

« Trouver un spécialiste de l’industrie, du plan produits, du marketing, le tout doublé d’une personnalité capable de rassembler les équipes et de leur redonner confiance, relevait presque de la mission impossible », avait souligné début 2022 le Journal de l’automobile en le nommant « Homme de l’année ».

Fils d’un banquier d’affaires, Luca de Meo a vécu dans 12 pays, passant une partie de son enfance au Brésil, en Côte d’Ivoire et au Nigeria.

Francophone quasi-parfait, il a été scolarisé en français jusqu’à 14 ans mais a conservé un accent italien.

M. de Meo est décrit comme impatient, jusqu’à en être pénible quand il a une idée en tête. « C’est son principal défaut », reconnaît un collaborateur.

Marié, il est père de deux jumeaux d’une vingtaine d’années, également scolarisés en français, langue dans laquelle ils échangent à la maison.

aro-tsz/uh/mlb© 2023AFP

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